L’Élysée au bord du gouffre : la démission de Macron et l’effondrement de la Ve République. Nous allons tout vous expliquer sur qu’est-ce qui peut se passer en France dans les prochaines heures.
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Le gouvernement de 27 jours et la question présidentielle
Au matin du 6 octobre 2025, une nouvelle secousse a ébranlé les fondations déjà fragiles de la République française. Le Premier ministre, Sébastien Lecornu, a présenté la démission de son gouvernement au président Emmanuel Macron, qui l’a acceptée. Cet événement, loin d’être un simple remaniement ministériel, a marqué le point culminant d’une crise politique et institutionnelle sans précédent. Avec une durée de vie de seulement 27 jours, le gouvernement Lecornu est entré dans l’histoire comme le plus éphémère de la Ve République, un indicateur brutal de l’instabilité systémique qui paralyse le pays.
Le catalyseur immédiat de cette implosion fut une rupture de confiance fondamentale au sein même de la coalition naissante. Des figures de premier plan, à l’instar du sénateur Bruno Retailleau, ont dénoncé un manque de transparence, citant spécifiquement la nomination non concertée de Bruno Le Maire comme un manquement intolérable à la parole donnée. Cette crise ne portait pas sur des divergences politiques profondes, mais sur un effondrement de la confiance et de la capacité opérationnelle au plus haut sommet de l’État, révélant un exécutif incapable de se maintenir en ordre de marche.
La démission d’un Premier ministre, traditionnellement considéré comme le « fusible » constitutionnel protégeant le Président, a inévitablement reporté toute la pression sur la figure d’Emmanuel Macron. Alors que l’exécutif est paralysé et que les solutions politiques semblent épuisées, une question autrefois impensable domine désormais le débat public : la démission du Président lui-même est-elle devenue une option plausible, voire une nécessité, pour sortir la France de la polycrise dans laquelle elle s’enfonce? Les appels de l’opposition, de la demande de dissolution de Marine Le Pen à la motion de destitution réclamée par Jean-Luc Mélenchon, témoignent de la gravité de la situation et placent le chef de l’État face à un choix historique.
Anatomie d’une polycrise
Le blocage politique actuel n’est pas un événement isolé. Il est l’aboutissement de crises convergentes — institutionnelle, économique et sociale — qui se sont intensifiées tout au long du second mandat d’Emmanuel Macron, plongeant la France dans une spirale de déclin et de défiance.
L’impasse institutionnelle : une République bloquée
L’origine de la paralysie actuelle remonte à la décision du président Macron de dissoudre l’Assemblée nationale en juin 2024. Largement perçue comme une erreur de calcul stratégique, cette dissolution a engendré un parlement « tripolarisé » et sans majorité claire, créant les conditions d’un blocage institutionnel systémique. S’en est suivie une cascade de défaillances gouvernementales qui ont méthodiquement sapé l’autorité de l’État.
La transition de 67 jours pour former le gouvernement de Michel Barnier, la plus longue de l’histoire de la République, a été le premier signe de cette nouvelle ère d’instabilité. La chute de ce même gouvernement, le 4 décembre 2024, par le vote d’une motion de censure — la première à aboutir depuis 1962 — a marqué la fin de toute possibilité de gouverner durablement sans majorité absolue. La nomination et l’effondrement quasi immédiat du gouvernement Lecornu en octobre 2025 n’ont été que la confirmation finale et spectaculaire de la faillite du système.
Cette séquence révèle un paradoxe au cœur de la Ve République : les outils constitutionnels conçus par Charles de Gaulle pour garantir la stabilité et surmonter la paralysie parlementaire sont devenus les catalyseurs d’une crise institutionnelle sans précédent. La dissolution, pouvoir régalien du Président, a produit un blocage ingérable. L’article 49.3, prévu pour des circonstances exceptionnelles, a été utilisé 27 fois en huit ans, devenant un mode de gouvernance ordinaire qui a délégitimé à la fois l’exécutif et les lois ainsi adoptées. La chute de deux Premiers ministres en moins d’un an démontre que le Président n’a plus la capacité de nommer un gouvernement viable. Les mécanismes gaullistes, au lieu de produire de la stabilité, exacerbent désormais l’impasse, suggérant une crise du régime lui-même. Élu sur une promesse de transformation, Emmanuel Macron est aujourd’hui perçu comme celui qui a « méthodiquement affaibli les piliers de la République », transformant le régime en un système « hyper-centralisé, affaibli et contesté » et créant un « vide institutionnel durable ».
Les failles économiques : une nation au bord du gouffre
La crise politique se déroule sur fond de dégradation alarmante des finances publiques, une réalité qui contraint l’action politique et alimente le mécontentement social. La dette publique a atteint le chiffre vertigineux de 3 416 milliards d’euros au deuxième trimestre 2025, soit 115,6 % du PIB, en augmentation de plus de 1 100 milliards d’euros depuis 2017. Le déficit budgétaire, à 5,8 % du PIB en 2024, est près de deux fois supérieur à la limite de 3 % fixée par l’Union européenne, rendant impératifs des plans d’austérité qu’aucun gouvernement ne semble en mesure de faire adopter.
Ce déséquilibre a entraîné une perte de confiance des acteurs économiques et des agences de notation. En octobre 2024, Moody’s a basculé sa perspective sur la France à « négative », s’inquiétant de la persistance des déficits. En septembre 2025, Fitch Ratings a dégradé la note de la France à A+, liant explicitement cette décision à « l’impasse politique » et à l’incapacité de maîtriser les finances publiques. Ces avertissements se traduisent par une augmentation du coût de l’emprunt : l’écart de taux (le spread) entre les obligations françaises à 10 ans (OAT) et leurs équivalents allemands (Bund) s’est creusé, signe d’une prime de risque croissante. Le fait que la France emprunte désormais à des taux supérieurs à ceux de la Grèce, un scénario impensable il y a quelques années, est un indicateur historique de la gravité de la situation.
Ce fardeau macroéconomique a un coût social direct et tangible pour les citoyens. Après une brève embellie en 2024, le pouvoir d’achat devrait stagner en 2025 avant de reculer en 2026. Cette érosion, qui fait suite à une hausse des prix de 14 % en quatre ans, nourrit la colère populaire et l’opposition aux coupes budgétaires. Le taux de pauvreté a atteint un niveau record de 15,4 % en 2023, touchant près de 10 millions de personnes, tandis que les inégalités se sont creusées de manière spectaculaire : les 20 % les plus riches gagnent 4,5 fois plus que les 20 % les plus pauvres, et les 10 % les plus fortunés possèdent un patrimoine 163 fois supérieur à celui des 10 % les plus modestes. Cette fracture sociale, combinée à une désindustrialisation continue — 100 fermetures d’usines par an en moyenne depuis 2017 — ancre le malaise économique dans les territoires et explique le rejet massif des politiques menées.
Indicateur | 2017 | 2025 (ou dernière donnée disponible) | Évolution | |
Dette publique (% PIB) | ~98 % | 115,6 % (T2 2025) | +17,6 points | |
Dette publique (€ milliards) | 2 281 | 3 416 (T2 2025) | +1 135 milliards | |
Déficit public (% PIB) | 2,8 % | 5,8 % (2024) | +3,0 points | |
Taux de pauvreté | 13,6 % | 15,4 % (2023) | +1,8 points | |
Satisfaction présidentielle | ~50 % | 19 % (Sept. 2025) | -31 points | |
Usages de l’article 49.3 | 0 | 27 | +27 | |
Classement démocratie (EIU) | 20e (Démocratie pleine) | 26e (Démocratie défaillante) | -6 places | |
Sources : |
Une République fracturée : désillusion et division
La crise politique est le symptôme d’une fracture plus profonde : celle du contrat social et de la confiance des citoyens envers leurs institutions. Le baromètre du CEVIPOF parle de « désillusion politique », un concept qui dépasse la simple apathie pour décrire une conviction partagée de l’impuissance du politique. Les chiffres sont éloquents : seuls 19 % des Français sont satisfaits de l’action d’Emmanuel Macron, 78 % jugent que la démocratie fonctionne mal, 74 % considèrent les élus comme corrompus et 83 % estiment que les responsables politiques ne tiennent pas compte de leur avis.
Cette rupture de confiance se superpose à des fractures sociales et territoriales profondes. L’analyse de Jérôme Fourquet sur « L’Archipel français » décrit une nation éclatée en « îles » sociales et culturelles qui ne communiquent plus entre elles, rendant impossible tout consensus national. Celle de Christophe Guilluy sur « La France périphérique » met en lumière le fossé entre les métropoles mondialisées et les territoires désindustrialisés, principale source du ressentiment populaire et du vote populiste. L’analyse des diagnostics de performance énergétique (DPE) offre une illustration concrète de cette division, opposant un « croissant fertile » de régions dynamiques à une « diagonale du vide » en situation de précarité énergétique.
Cette désintégration du corps social se manifeste par une montée des tensions qui dépasse le seul champ politique. On observe une augmentation de l’agressivité et des incivilités dans les interactions quotidiennes, que ce soit envers les élus, les agents des services publics ou dans les transports en commun. La paralysie politique à Paris n’est donc pas la cause du mal, mais plutôt la manifestation la plus visible d’un effritement plus large du contrat social. Dans ce contexte, la rue devient le principal exutoire des frustrations. Les syndicats, forts d’une unité retrouvée, ont appelé à un « automne du mécontentement » avec des journées de grève et de mobilisation massives les 18 septembre et 2 octobre. Leur stratégie est claire : face à un pouvoir institutionnel paralysé, ils entendent créer leur propre « rapport de force » par des actions de blocage stratégiques et une pression sociale durable.
Le labyrinthe constitutionnel : les scénarios de sortie
Face à cette impasse totale, l’analyse des issues possibles passe par un examen rigoureux des options prévues par la Constitution de la Ve République. Chacune d’entre elles présente des contraintes et des risques politiques majeurs.
Scénario | Base Constitutionnelle | Déclencheur | Calendrier | Contraintes Majeures | Risque Politique Principal | |
Démission Présidentielle | Article 7 | Acte volontaire du Président | Élection présidentielle sous 20 à 35 jours | Pouvoirs de l’intérimaire (Président du Sénat) limités. Incertitude juridique sur la rééligibilité du Président sortant (Art. 6). | Crise institutionnelle majeure sur l’interprétation de la Constitution ; perçu comme une manœuvre politique. | |
Dissolution de l’Assemblée | Article 12 | Décision du Président | Élections législatives sous 20 à 40 jours | Interdite dans l’année suivant une précédente dissolution. Option bloquée jusqu’en juin 2025. | Inapplicable à la crise actuelle. Risque de reconduire une assemblée sans majorité claire. | |
Statu Quo / Enlisement | (Absence d’action) | Incapacité à former un gouvernement stable | Indéfini | Impossibilité de faire voter un budget et des lois. Paralysie de l’action publique. | Dégradation des services publics, crise économique et sociale, montée des extrêmes. | |
Sources : |
L’hypothèse de la démission (Article 7)
La voie la plus radicale pour sortir de la crise serait la démission du Président de la République. L’article 7 de la Constitution organise cette éventualité : en cas de « vacance » de la présidence, les fonctions sont exercées par intérim par le président du Sénat. Une nouvelle élection présidentielle doit alors se tenir dans un délai de 20 à 35 jours. Les pouvoirs du président par intérim sont volontairement restreints : il ne peut ni convoquer de référendum, ni dissoudre l’Assemblée, ni engager de révision constitutionnelle, afin d’éviter toute instrumentalisation de cette période transitoire.
Cependant, ce scénario ouvre une boîte de Pandore constitutionnelle et politique : la question de la rééligibilité d’Emmanuel Macron. L’article 6 de la Constitution stipule que « Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Le débat juridique fait rage pour savoir si une démission en cours de second mandat « brise » la consécutivité et autoriserait le président sortant à se représenter immédiatement. Certains constitutionnalistes estiment qu’un mandat entamé vaut pour un mandat plein, rendant une nouvelle candidature impossible. D’autres soutiennent que le texte n’interdit qu’un troisième mandat après l’achèvement complet du second. Cette ambiguïté est un terrain miné. Politiquement, une telle manœuvre serait perçue par une large partie de l’opinion et de la classe politique comme un « coup d’État » institutionnel, une tentative cynique de contourner l’esprit de la Constitution, susceptible de délégitimer totalement le processus électoral et de plonger le pays dans une crise encore plus profonde.
La manœuvre de la dissolution (Article 12)
L’arme traditionnelle du Président pour résoudre un conflit avec l’Assemblée nationale est le droit de dissolution, prévu à l’article 12. Il permet de redonner la parole aux électeurs pour trancher une crise politique. Toutefois, ce pouvoir est assorti d’une contrainte temporelle formelle : « Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections ».
Cette limitation rend cette option totalement inopérante pour la crise d’octobre 2025. La dernière dissolution ayant eu lieu en juin 2024, Emmanuel Macron est constitutionnellement empêché d’y recourir à nouveau avant juin 2025. La principale soupape de sécurité du régime est donc désactivée. La dissolution n’est pas une solution à court terme, mais une possibilité pour le moyen terme, si l’impasse devait perdurer.
La voie de l’inaction : gouverner dans le chaos
Face aux risques des deux premiers scénarios, la dernière option est celle de l’enlisement. Cette voie n’est cependant pas un état stable, mais une lente décomposition de l’État. L’incapacité à faire voter un budget pour 2026, après les difficultés déjà rencontrées pour celui de 2025 qui avait nécessité une « loi spéciale » transitoire après la chute du gouvernement Barnier, aurait des conséquences dévastatrices.
Les services publics seraient les premières victimes. Le système hospitalier, déjà en crise structurelle, verrait son état se dégrader davantage sans visibilité budgétaire. Les collectivités locales, privées de dotations claires, devraient réduire leurs propres services de proximité. Les investissements dans des domaines clés comme la transition écologique seraient gelés, compromettant les engagements climatiques de la France. L’incertitude politique pèserait lourdement sur l’économie, décourageant l’investissement et la consommation, et agissant comme un frein puissant sur une croissance déjà fragile.
La France se retrouve ainsi dans une situation d’échec et mat institutionnel. Les issues de secours constitutionnelles sont soit bloquées, soit trop risquées, soit mènent à une dégradation encore plus grande. La Constitution, conçue pour permettre une action décisive, impose aujourd’hui un statu quo destructeur.
La France à la dérive : conséquences nationales et internationales
La crise interne de la France produit des ondes de choc qui dépassent largement ses frontières, affectant son rôle en Europe et dans le monde, et redéfinissant son paysage politique intérieur au profit des forces les plus radicales.
Le domino européen : un moteur en panne et un risque de contagion
L’expression « moteur franco-allemand » a longtemps décrit la capacité du couple Paris-Berlin à impulser l’intégration européenne. Aujourd’hui, ce moteur est grippé. Absorbée par ses crises internes, la France n’est plus un partenaire fiable et proactif pour l’Allemagne, ce qui paralyse l’Union européenne à un moment critique de son histoire, confrontée à la guerre en Ukraine et à des défis économiques majeurs.
Cette faiblesse est perçue avec inquiétude et parfois avec une certaine ironie par ses voisins. La presse italienne compare l’instabilité française à ses propres crises passées, soulignant le poids de la dette publique tricolore. Les analystes espagnols pointent la dissolution « irresponsable » de 2024 comme la cause première du chaos actuel. À Bruxelles, l’inquiétude domine, car la paralysie de la deuxième économie de la zone euro menace la capacité de décision de l’UE tout entière. Si les experts estiment qu’une crise de la dette de la zone euro peut être évitée grâce aux mécanismes de la Banque Centrale Européenne, le risque d’une contagion économique via un affaiblissement de la croissance européenne et une pression sur l’euro reste réel.
Un vide géopolitique : défense, Ukraine et autonomie stratégique
Sur la scène internationale, l’affaiblissement de la France crée un vide. Emmanuel Macron s’était positionné comme un leader dans le soutien européen à l’Ukraine. L’instabilité politique actuelle « risque de détourner, voire de nuire à » ce leadership, tandis que la paralysie budgétaire menace directement la capacité de la France à honorer ses engagements en matière de dépenses de défense et d’aide à Kiev.
Plus fondamentalement, la crise porte un coup sévère à l’ambition d’une « autonomie stratégique » européenne, un concept dont la France est le principal promoteur. Sans un Paris fort et engagé, ce projet perd son plus ardent défenseur. Cela pourrait se traduire par un recul de la coordination européenne en matière de défense et une dépendance accrue envers les États-Unis, à l’opposé de l’objectif d’une Europe plus souveraine. La crise française n’est donc pas seulement un problème intérieur ; elle accélère une recomposition des équilibres de pouvoir au sein de l’UE. Le vide laissé par un axe franco-allemand à l’arrêt pourrait profiter à d’autres acteurs, comme la Pologne au sein du Triangle de Weimar, et mener à une Europe plus multipolaire, plus fragmentée et potentiellement moins intégrée.
Le Rassemblement National dans l’antichambre du pouvoir
Le principal bénéficiaire de ce chaos institutionnel et de cette désillusion citoyenne est sans conteste le Rassemblement National (RN). La stratégie de « normalisation » du parti, couplée à un discours axé sur le pouvoir d’achat, a capitalisé sur le rejet des élites et l’a transformé en première force d’opposition du pays.
L’éventualité d’une victoire du RN à la prochaine élection présidentielle — qu’elle ait lieu en 2027 ou plus tôt en cas de démission — est désormais considérée comme un « point de bascule pour l’Europe ». Un tel scénario entraînerait une rupture fondamentale avec le projet européen. Le programme du RN, avec ses concepts de « préférence nationale » et ses mesures anti-immigration, entrerait en conflit direct avec les traités européens et la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE.
Bien que le parti n’appelle plus à une sortie de l’UE, sa vision d’une « alliance de nations souveraines » où le droit national primerait sur le droit européen reviendrait à démanteler l’Union de l’intérieur, dans un processus qualifié de « Frexit lent et désordonné ». En matière de politique étrangère, une présidence RN signifierait probablement un retrait du commandement intégré de l’OTAN, la fin des sanctions contre la Russie et l’arrêt du soutien militaire à l’Ukraine, brisant ainsi l’unité du camp occidental.
La fin d’une époque?
La démission du gouvernement Lecornu n’est pas une simple péripétie politique. C’est le symptôme le plus récent et le plus aigu d’une crise systémique de l’État français, de son économie et de sa société. Le président Emmanuel Macron est aujourd’hui pris au piège d’un choix impossible : poursuivre sur la voie d’une paralysie qui mène à une lente décomposition, ou tenter un électrochoc par la démission, un pari aux conséquences constitutionnelles et politiques potentiellement explosives, qui pourrait ouvrir un boulevard au Rassemblement National.
Quelle que soit sa décision, cette crise marque potentiellement la phase terminale de la Ve République telle que nous la connaissons. La convergence de l’échec institutionnel, du déclin économique et de la fragmentation sociale a poussé le modèle gaulliste à son point de rupture. La question n’est plus de savoir qui gouvernera la France dans les prochains mois, mais si ses institutions sont encore capables de la gouverner. La République peut-elle se réformer pour sortir de l’impasse, ou le pays est-il engagé sur une trajectoire irréversible vers un changement de régime fondamental, que ce soit par une refonte constitutionnelle ou par l’arrivée au pouvoir de forces hostiles à ses principes fondateurs? L’avenir de la France, et avec elle une partie de celui de l’Europe, se joue dans les semaines à venir.