Mexique : L’heure du précipice. Analyse d’une souveraineté contestée entre chaos criminel et ingérence étrangère. Aujourd’hui, nous constatons un affaiblissement des USA et une volonté de mettre le bordel dans le monde pour essayer de faire tenir un régime qui cause des préjudices à la population des USA et du monde. Aujourd’hui aux USA on regrette le Président Biden, mais les choses qui se passe au Mexique sont gravent.

Mexique L’Heure du Précipice. Analyse d’une Souveraineté Contestée entre Chaos Criminel et Ingérence Étrangère.
L’assassinat du maire Carlos Manzo a exposé la fracture béante du Mexique : une présidente populaire incapable d’arrêter l’effusion de sang, et un voisin américain déterminé à intervenir. Une analyse de la “polycrise” de novembre 2025.
Le 1er novembre 2025, alors que la ville d’Uruapan, dans l’État du Michoacán, célébrait le Jour des Morts lors de son traditionnel “Festival de las Velas” (Festival des Bougies), la violence politique a frappé avec une précision et une symbolique brutales. Le maire de la ville, Carlos Alberto Manzo Rodríguez, a été abattu en public, devant des dizaines de familles et de témoins. Ce n’était pas un simple assassinat ; c’était un acte de terreur politique calculé, une exécution visant à démontrer l’impuissance de l’État.
Cet événement, bien que choquant, n’est pas un incident isolé. Il s’inscrit dans une vague de violence politique qui dévaste le Michoacán. Manzo est devenu le septième maire assassiné dans cet État depuis 2022. De plus, son meurtre constituait le deuxième assassinat d’une personnalité de premier plan en moins de deux semaines. Le 20 octobre, Bernardo Bravo, le leader charismatique de l’association des producteurs de citrons verts de la vallée d’Apatzingán, avait été retrouvé mort après avoir publiquement dénoncé l’extorsion rampante des cartels.
Carlos Manzo n’était pas un maire ordinaire. Élu en tant que candidat indépendant, il avait capté l’attention nationale en adoptant une posture de “tolérance zéro” face au crime organisé. Surnommé par certains le “Bukele mexicain”, il prônait une politique de sécurité intransigeante, déclarant publiquement que “les criminels armés doivent être abattus sans hésitation”. Cette philosophie de “main de fer” représentait une critique ouverte et directe de la stratégie de sécurité du gouvernement fédéral.
Cette divergence idéologique avait créé un conflit public avec la présidente du Mexique, Claudia Sheinbaum. Lorsque Manzo avait autorisé sa police locale à utiliser la force létale, Sheinbaum l’avait publiquement réprimandé, insistant sur la nécessité de respecter “l’état de droit”. En retour, Manzo, se sentant de plus en plus isolé, avait lancé des appels à l’aide désespérés à la présidente, accusant le gouvernement fédéral d’avoir “abandonné” sa région face à des cartels surarmés.
Les premiers éléments de l’enquête désignent sans ambiguïté le Cartel Jalisco Nouvelle Génération (CJNG) comme le commanditaire de l’assassinat. Des sources proches de l’enquête, consultées par EL PAÍS, suggèrent qu’il s’agit d’une vengeance directe. La police locale de Manzo avait récemment porté un coup dur au cartel en capturant l’un de ses chefs locaux, René Belmonte, alias “Rino”, un lieutenant clé du CJNG dans la région. L’assassin lui-même, un adolescent de 17 ans nommé Víctor Manuel Ubaldo Vidales, symbolise tragiquement l’effondrement social et la capacité de recrutement des cartels.
L’assassinat de Carlos Manzo a servi de catalyseur à une crise de souveraineté à trois niveaux. Au niveau local, il a confirmé l’échec de l’État mexicain à protéger ses propres fonctionnaires face à la puissance militaire du CJNG. Au niveau national, il a fourni un point de ralliement martyr aux critiques de la présidente Sheinbaum, déclenchant des manifestations violentes au cœur même de Mexico. Et au niveau international, il a fourni à l’administration américaine le prétexte parfait pour accélérer sa campagne d’ingérence agressive, une campagne que la présidente mexicaine, forte de sa popularité, s’efforce de dénoncer comme une violation intolérable de la souveraineté nationale.
La Fracture : de l’Agonie du Michoacán à la Fureur du Zócalo
La mort de Carlos Manzo n’est que le symptôme le plus visible d’une maladie qui ronge le cœur économique et agricole du Mexique. Le Michoacán, décrit par les analystes comme un “microcosme” de la crise sécuritaire nationale, est devenu un champ de bataille pour le contrôle territorial, non seulement des routes de la drogue, mais aussi des industries licites qui définissent l’État.
L’Incendie du Michoacán : Un “Microcosme” de l’État en Décomposition
Le Michoacán est le “cœur” de la production mondiale d’avocats et un centre vital pour la culture des citrons verts. Cette richesse agricole est devenue sa malédiction. Depuis des années, des groupes criminels, principalement le CJNG et les Cárteles Unidos (y compris Los Viagras), se livrent une guerre pour le contrôle de ces chaînes d’approvisionnement, imposant une “taxe” d’extorsion sur chaque kilo de fruit produit. La violence n’est plus un sous-produit du trafic de drogue ; elle est l’outil principal de la gouvernance criminelle.
L’assassinat de Bernardo Bravo, le 20 octobre 2025, a été le premier avertissement. Bravo n’était pas un politicien, mais un leader agricole qui avait osé dénoncer publiquement le “détournement commercial permanent” de l’industrie du citron par le crime organisé. Sa mort a envoyé un message clair à tous les producteurs de la région : le silence ou la mort.
Dans ce contexte, l’assassinat de Carlos Manzo, moins de deux semaines plus tard, a été la détonation finale. Ce qui rend sa mort si dévastatrice pour le moral public est l’échec flagrant de l’État à le protéger. Manzo bénéficiait d’une protection fédérale assignée. Le ministre mexicain de la Sécurité, Omar García Harfuch, a confirmé lors d’une conférence de presse que Manzo disposait d’une escorte depuis décembre 2024 et que celle-ci avait même été “renforcée” en mai 2025.
Pourtant, cette protection, composée de troupes de la Garde Nationale, n’a pas pu (ou n’a pas su) empêcher un tueur de 17 ans, armé d’une arme de poing, de l’exécuter de sept balles en pleine célébration publique. Les condoléances officielles de García Harfuch, déplorant une “perte douloureuse et injuste aux mains du crime organisé”, ont été perçues par une population en deuil non pas comme un soutien, mais comme un aveu d’impuissance.
“Nous sommes tous Carlos Manzo” : La Marche du 15 Novembre
L’onde de choc générée au Michoacán a déferlé sur la capitale. Le 15 novembre 2025, des milliers de manifestants ont convergé vers la Plaza de la Constitución, le Zócalo, siège du pouvoir exécutif et résidence de la présidente Sheinbaum.
La manifestation était une coalition inhabituelle de deux mouvements distincts, unis par la colère. Le premier était le “Movimiento del Sombrero” (Mouvement du Chapeau), un mouvement politique indépendant fondé par Manzo lui-même. Après sa mort, sa veuve, Grecia Quiroz, qui a repris ses fonctions de maire d’Uruapan, a juré de poursuivre son héritage. Des sympathisants, dont beaucoup portaient le chapeau de paille emblématique de Manzo, sont venus à Mexico pour exiger justice.
Le second groupe était le mouvement “Génération Z”. Ce collectif de jeunes, s’inscrivant dans une vague mondiale de protestations, a utilisé les réseaux sociaux pour mobiliser contre ce qu’ils perçoivent comme une corruption systémique, l’impunité et l’échec de l’État à assurer la sécurité.
Les slogans et les symboles de la marche étaient puissants. Des bannières proclamaient “Nous sommes tous Carlos Manzo” et “Carlos n’est pas mort, le gouvernement l’a tué”. Fait notable, le drapeau pirate du manga japonais “One Piece”, devenu un symbole mondial de la contestation de la Gen Z contre l’establishment, flottait aux côtés des sombreros traditionnels. La frustration transcendait les générations, unissant la douleur rurale du Michoacán à la colère urbaine de la capitale.
La Bataille du Palais National et la Guerre des Récits
Ce qui avait commencé comme une manifestation a rapidement dégénéré en affrontements violents aux portes du Palais National. Des manifestants, dont un groupe d’individus masqués et encagoulés, ont renversé les lourdes barrières métalliques protégeant le palais et ont lancé des pavés et d’autres projectiles sur les forces anti-émeutes.
La police a répliqué avec des gaz lacrymogènes, des bombes fumigènes et des extincteurs. Le bilan officiel, communiqué par le secrétaire à la Sécurité de la capitale, Pablo Vazquez, est lourd : 120 blessés au total, dont une centaine de policiers (40 hospitalisés) et une vingtaine de manifestants. Vingt personnes ont été arrêtées. Au milieu du chaos, les manifestants ont crié une phrase qui résumait toute la tragédie : “C’est comme ça que vous auriez dû protéger Carlos Manzo!”.
La réponse de la présidente Claudia Sheinbaum à cet événement est fondamentale pour comprendre la crise politique. Elle n’a pas traité cette manifestation comme une expression légitime de colère citoyenne, but comme une attaque politique orchestrée. Dans les jours qui ont précédé le 15 novembre, Sheinbaum avait déjà préparé le terrain. Elle a publiquement dénoncé le mouvement de protestation comme étant “désorganisé” et, plus gravement, “financé”, “promu de l’étranger” et infiltré par des “partis de droite”.
Cette rhétorique, qui pourrait sembler paranoïaque de la part d’une présidente jouissant d’une popularité écrasante, trouve une justification dans les faits. L’analyse des dynamiques de la manifestation révèle une cooptation politique évidente. Des influenceurs de la “Génération Z” qui avaient initialement soutenu l’appel se sont publiquement retirés, sentant une récupération politique. Simultanément, des figures de l’opposition traditionnelle, que les jeunes manifestants prétendaient rejeter, ont bruyamment soutenu la marche. Parmi eux, l’ancien président conservateur Vicente Fox et le milliardaire critique du gouvernement, Ricardo Salinas Pliego.
La présidente Sheinbaum ne voyait donc pas des citoyens en colère au Zócalo ; elle voyait une opération de déstabilisation. Sa dénonciation d’une “infiltration étrangère” n’était pas une simple posture rhétorique. Elle était le reflet direct de la confrontation bien réelle et simultanée qu’elle mène contre une administration américaine de plus en plus interventionniste.
Le Paradoxe Sheinbaum (La Cible de l’Utilisateur)
L’affirmation selon laquelle le “règne de terreur” de Claudia Sheinbaum touche à sa fin se heurte à une réalité factuelle complexe. Cette complexité est au cœur de la crise actuelle : la présidente mexicaine est à la fois exceptionnellement populaire et exceptionnellement vulnérable. Comprendre ce paradoxe est essentiel pour saisir pourquoi elle est devenue une cible.
Démystifier le “Règne de Terreur” : La Bataille des Sondages
L’affirmation d’un “règne de terreur” est directement contredite par les données empiriques sur l’opinion publique mexicaine. Loin d’être impopulaire, Claudia Sheinbaum, après un an de mandat (elle a pris ses fonctions le 1er octobre 2024), jouit d’un taux d’approbation record.
Les principaux instituts de sondage mexicains convergent massivement sur ce point :
-
Enkoll, dans une enquête pour EL PAÍS et W Radio publiée le 1er octobre 2025, crédite Sheinbaum de 78% d’approbation, contre seulement 18% de désapprobation.
-
El Financiero, dans son enquête nationale de septembre 2025, mesure son approbation à 73%, un chiffre stable par rapport aux 70% d’octobre.
-
Mitofsky, dans un sondage pour El Economista publié le 13 novembre 2025 (en pleine crise Manzo), la place à 71.4% d’approbation.
Ces chiffres ne sont pas seulement élevés ; ils sont historiquement sans précédent. L’approbation de Sheinbaum dépasse celle de son prédécesseur et mentor, Andrés Manuel López Obrador (AMLO), et celle de tous les présidents mexicains des deux dernières décennies à la même étape de leur mandat. Cette popularité n’est pas un mystère ; elle est solidement ancrée dans la continuation et l’expansion des programmes sociaux (pensions pour les personnes âgées, bourses pour les étudiants) qui ont sorti des millions de personnes de la pauvreté.
Comment, dès lors, l’opposition et les détracteurs externes peuvent-ils attaquer une présidente forte de 70 à 78% d’approbation? La réponse se trouve dans une “guerre des sondages”, une tactique classique de déstabilisation informationnelle.
Alors que les sondages nationaux confirment sa popularité, une seule source, la société américaine Morning Consult, présente une réalité radicalement différente. Dans son “Global Leader Approval Rating Tracker”, dont les données ont été collectées précisément au cœur de la crise (6-12 novembre 2025), Morning Consult attribue à Sheinbaum un taux d’approbation de seulement 41%, contre 53% de désapprobation. (D’autres articles citent ce même tracker à des dates antérieures avec des chiffres plus élevés, 60% ou 66%, ce qui suggère soit une divergence méthodologique, soit une chute drastique et isolée, soit que le chiffre de 41% est une anomalie spécifique à la crise de novembre).
Ce chiffre de 41% est immédiatement devenu une arme politique. Il a été massivement militarisé sur les réseaux sociaux par des comptes d’opposition pour briser le narratif de la légitimité populaire de Sheinbaum et valider le discours de la “fin du règne”. La “réalité” de la popularité de Sheinbaum est donc un champ de bataille informationnel. La crise de sécurité est l’outil utilisé pour tenter de faire chuter les sondages nationaux (basés sur le social) et de valider le sondage international (Morning Consult) qui la dépeint comme impopulaire.
| Institut de Sondage | Juridiction | Date de Publication | Taux d’Approbation | Taux de Désapprobation | Contexte / Source |
|---|---|---|---|---|---|
| Enkoll | Mexique | 1er Octobre 2025 | 78% | 18% | Enquête nationale, axée sur les 1 an de mandat |
| El Financiero | Mexique | 1er Septembre 2025 | 73% (stable à 70% en Octobre) | 26% | Enquête nationale téléphonique |
| Mitofsky | Mexique | 13 Novembre 2025 | 71.4% | ~28% | Enquête pour El Economista |
| Morning Consult | États-Unis | 14 Novembre 2025 | 41% | 53% | Tracker global, données du 6–12 novembre |
L’Échec de la “Stratégie Sheinbaum” en Matière de Sécurité
Si la popularité de Sheinbaum est blindée sur le front social, elle est totalement exposée sur le front de la sécurité. Les sondages mexicains, bien que globalement favorables, révèlent que l’insécurité, la violence et la corruption sont les principaux et quasi-uniques reproches faits à son administration. C’est son talon d’Achille.
Elle a pourtant tenté, au moins rhétoriquement, de se démarquer de la politique controversée de “Abrazos, no balazos” (Des étreintes, pas des balles) de son prédécesseur. Sa stratégie, lancée début 2025, repose sur quatre piliers :
-
S’attaquer aux causes : Poursuivre les programmes sociaux pour réduire la pauvreté et le recrutement.
-
Consolider la Garde Nationale : Renforcer la Garde Nationale en la plaçant sous le commandement opérationnel complet du Secrétariat à la Défense (SEDENA), achevant sa militarisation.
-
Renforcer le renseignement : Augmenter les capacités d’enquête et de renseignement, notamment via une coordination accrue avec le ministre de la Sécurité, Omar García Harfuch.
-
Coordination accrue : Interventions ciblées et meilleure coordination entre les autorités fédérales et étatiques.
L’assassinat de Carlos Manzo est l’échec hurlant et total de cette nouvelle stratégie, point par point. La mort de ce maire n’est pas le résultat d’une absence de stratégie fédérale, mais de l’inefficacité de cette stratégie face à la réalité du terrain.
L’analyse de l’échec est clinique :
-
Carlos Manzo (un maire d’opposition) avait critiqué l’inefficacité fédérale.
-
En réponse, le gouvernement Sheinbaum a appliqué son Pilier n°4 (Coordination) et lui a assigné une protection.
-
Cette protection était composée d’éléments du Pilier n°2 (Garde Nationale).
-
Cette protection avait même été “renforcée”, démontrant une application du Pilier n°3 (Renseignement) qui avait (ou aurait dû) identifier la menace.
-
Et pourtant, un tueur de 17 ans, agissant pour le compte du CJNG, a déjoué l’intégralité de ce dispositif de sécurité fédéral et militarisé, en public.
La mort de Manzo a prouvé à la population mexicaine, et au monde, que ni la “main de fer” prônée par Manzo ni la “coordination” prônée par Sheinbaum ne peuvent les protéger. C’est cette vulnérabilité béante qui a créé l’opportunité politique, tant pour l’opposition interne que pour les acteurs externes.
L’Intervention Américaine : Analyse d’une Campagne de Déstabilisation
La crise sécuritaire au Michoacán et la crise politique au Zócalo n’existent pas dans un vide géopolitique. Elles surviennent à un moment de tension maximale entre Mexico et Washington, où l’administration américaine actuelle a fondamentalement redéfini les règles de l’engagement. L’analyse des événements de novembre 2025, mise en perspective avec la politique américaine, rend la théorie d’une campagne de déstabilisation non seulement plausible, mais probable.
Le Contexte : L’Administration Trump et la “Guerre contre la Terreur” des Cartels
Depuis le début de son second mandat, l’administration Trump a adopté une posture d’une agressivité sans précédent envers le Mexique, transformant la coopération en matière de sécurité en une doctrine d’intervention unilatérale. Cette doctrine s’est déployée en trois étapes.
Étape 1 : La Désignation FTO (Foreign Terrorist Organization). En janvier 2025, le président Trump a signé un décret exécutif (EO 14157) ordonnant la désignation de plusieurs cartels mexicains, notamment le Cartel de Sinaloa et le CJNG, comme “Organisations Terroristes Étrangères”.
Cette désignation n’est pas symbolique. Elle constitue le fondement légal nécessaire à une intervention militaire. En requalifiant les cartels de criminels en terroristes, Washington fait basculer la lutte du droit pénal (qui nécessite la coopération, des mandats et des extraditions) au droit de la guerre (qui autorise la poursuite de “l’ennemi” où qu’il se trouve). Cette désignation fournit à l’exécutif américain la justification légale, selon sa propre doctrine, pour mener des actions militaires unilatérales et extraterritoriales – telles que des frappes de drones ou des opérations des forces spéciales – sur le sol mexicain pour “protéger la sécurité nationale américaine”.
Étape 2 : La Preuve de Concept – “L’Opération Southern Spear”. Pour prouver que cette doctrine n’était pas rhétorique, l’administration a lancé “l’Opération Southern Spear”. Depuis août 2025, le commandement sud de l’armée américaine (USSOUTHCOM) mène des frappes cinétiques létales contre des navires (souvent de simples bateaux de pêche ou des semi-submersibles) présumés transporter de la drogue dans les eaux internationales des Caraïbes et du Pacifique Est.
Ces opérations, menées avec des navires de guerre et un soutien aérien, sont des exécutions extrajudiciaires, sans procès ni capture. En date du 15 novembre 2025, le bilan de ces frappes s’élevait à 80 morts. Ces actions ont démontré la volonté de Washington d’utiliser la force militaire létale en dehors d’une zone de guerre traditionnelle, sous le prétexte de la lutte anti-drogue.
Étape 3 : L’Escalade (Début Novembre 2025). C’est dans ce contexte que survient l’assassinat de Carlos Manzo. Au moment précis où la crise de sécurité au Mexique éclate sur la scène internationale, des reportages de presse américains (notamment NBC News, citant des responsables américains actuels et anciens) révèlent que l’administration Trump a commencé la planification active d’opérations à l’intérieur du territoire mexicain. Ces plans incluent des frappes de drones ciblées et des incursions de troupes des forces spéciales. Il est également rapporté que ces opérations pourraient être menées sous l’autorité du Titre 50 (actions de renseignement secrètes) plutôt que du Titre 10 (actions militaires), afin de contourner la supervision du Congrès et de nier publiquement leur existence.
La “Confrontation” de Sheinbaum
Face à cette pression militaire et rhétorique, la présidente Sheinbaum, forte de sa légitimité populaire nationale, n’a pas cédé. Elle a choisi la confrontation directe, comme le stipule la requête de l’utilisateur.
Le 4 novembre 2025, trois jours seulement après l’assassinat de Manzo et en réponse directe aux reportages de NBC sur une intervention imminente, Claudia Sheinbaum a utilisé sa conférence de presse matinale (“mañanera”) pour envoyer un message sans équivoque à Washington. Interrogée sur la possibilité que des troupes américaines entrent au Mexique, sa réponse a été cinglante : “Ça n’arrivera pas” (“No va a pasar”).
Elle a martelé que le Mexique était un “pays libre, indépendant et souverain” et qu’il n’accepterait “aucun processus d’ingérence ou d’interventionnisme” de la part d’une puissance étrangère. Elle a également réitéré son désaccord avec les frappes navales de “l’Opération Southern Spear”, les qualifiant d’inacceptables.
Cette confrontation n’est pas nouvelle. Plus tôt dans l’année, lorsque l’administration Trump avait accusé son gouvernement de former des “alliances” avec les cartels (l’accusation de “narco-gouvernement”), Sheinbaum avait riposté avec fureur, qualifiant ces affirmations de “calomnieuses” (diffamatoires). Elle avait rétorqué que les seules alliances avec les criminels se trouvaient “dans les usines d’armement américaines qui vendent des armes de grande puissance à ces groupes”.
La chronologie des événements d’octobre et novembre 2025 est essentielle. Elle montre la convergence parfaite et simultanée de la crise interne et de la pression externe, chaque événement alimentant l’autre.
| Date | Événement / Action Mexicaine (Interne) | Action / Menace des États-Unis (Externe) | Réponse / Confrontation de Sheinbaum |
|---|---|---|---|
| 20 octobre | Assassinat de Bernardo Bravo, leader des producteurs de citrons (Michoacán). Fébrilité croissante dans l’État. | – | – |
| 1er novembre | Assassinat de Carlos Manzo, maire d’Uruapan (Michoacán), en public. | – | Condamnation officielle par le ministre O. G. Harfuch. |
| 3–4 novembre | Funérailles de Manzo. Début des protestations dans le Michoacán. | Reportages américains (NBC, etc.) exposant les plans envisagés pour des frappes de drones ou l’envoi de troupes au Mexique. | Conférence de presse : Sheinbaum rejette catégoriquement toute intervention américaine (« Ça n’arrivera pas »). |
| 10–13 novembre | – | Intensification de « l’Opération Southern Spear » (plus de 70 morts). Nouvelles sanctions annoncées par le Trésor américain. | – |
| 13–14 novembre | – | Publication du sondage Morning Consult (41 % d’approbation), amplifié par l’opposition. | Sheinbaum dénonce la manifestation imminente. |
| 15 novembre | Manifestations violentes au Zócalo ; attaque contre le Palais National. | – | Sheinbaum accuse les manifestants d’être « promus de l’étranger » et infiltrés par l’opposition (Fox, Salinas). |
| 16 novembre | Bilan : 120 blessés. Décalage progressif vers une crise politique consommée. | – | Sheinbaum condamne la violence des manifestants. |
Synthèse de la “Théorie du Coup d’État” : La Tenaille Hybride
L’analyse factuelle des événements concomitants, comme l’exige la requête, rend la théorie d’une déstabilisation orchestrée – un “coup d’État” au sens moderne du terme – hautement probable. Il ne s’agit pas d’un coup militaire classique, mais d’une guerre hybride sophistiquée, menée par une puissance étrangère utilisant des leviers internes pour atteindre ses objectifs.
Le mécanisme de cette déstabilisation est une tenaille hybride (une “pince”) :
-
La Pression Externe (Le Marteau) : L’administration américaine utilise la crise sécuritaire réelle au Mexique comme justification pour sa doctrine d’intervention unilatérale (la désignation FTO). Elle crée une menace militaire externe crédible (plans d’incursion) et mène des actions militaires humiliantes à la périphérie du Mexique (“Operation Southern Spear”) pour contester la souveraineté du pays.
-
La Pression Interne (L’Enclume) : L’assassinat de Carlos Manzo – un opposant direct à la stratégie de Sheinbaum – fournit le prétexte domestique parfait. La crise sécuritaire est immédiatement exploitée par l’opposition politique (Vicente Fox) et économique (Ricardo Salinas Pliego) pour attaquer la légitimité de Sheinbaum sur son unique point faible : la sécurité. La manifestation du Zócalo est le point culminant de cette pression interne.
-
La Connexion (L’Ingérence) : Le gouvernement Sheinbaum établit lui-même le lien. En accusant publiquement les manifestants du Zócalo (l’enclume) d’être “promus de l’étranger” (le marteau), l’administration mexicaine affirme que les États-Unis ne font pas que menacer ses frontières, mais qu’ils alimentent activement la sédition à l’intérieur de son palais.
Cette analyse valide donc la thèse que Washington exploite la crise de sécurité (l’assassinat de Manzo) pour contester la souveraineté d’une présidente qui, forte de sa popularité, refuse de s’aligner sur la doctrine d’intervention américaine.
Le Mexique à l’Heure de la Souveraineté
L’assassinat de Carlos Alberto Manzo Rodríguez, le 1er novembre 2025, n’était pas seulement la fin tragique d’un maire courageux ; il a marqué le début d’une “polycrise” existentielle pour le Mexique. Cet événement a simultanément exposé l’échec profond de la stratégie de sécurité de l’État face à la puissance paramilitaire des cartels et fourni le prétexte idéal à une escalade sans précédent de l’ingérence américaine.
La présidente Claudia Sheinbaum, en dépit d’une popularité nationale écrasante fondée sur sa politique sociale, se retrouve prise dans une lutte sur deux fronts. Elle est prise en tenaille entre la violence intraitable du CJNG au Michoacán et l’impérialisme sécuritaire de son voisin du nord.
La “guerre” en cours n’est plus seulement celle des balles. C’est une guerre de récits, illustrée par la bataille des sondages (les 78% d’Enkoll contre les 41% de Morning Consult). C’est une guerre politique, où des manifestations légitimes sont cooptées par des intérêts d’opposition pour servir un agenda externe. Et c’est, fondamentalement, une guerre de souveraineté.
Les événements de novembre 2025 – le meurtre, les manifestations et les menaces d’intervention – ont forcé le Mexique à se confronter à la question fondamentale de sa propre indépendance au 21e siècle. La suggestion d’une tentative de “coup d’État” américain trouve sa validation non pas dans une théorie du complot, mais dans les actions publiques, les menaces documentées et la convergence chronologique d’une campagne de déstabilisation hybride visant une présidente qui, bien que vulnérable sur le plan de la sécurité, reste trop populaire et trop indépendante pour Washington.

