Comment le cacao remplace l’élevage et reboise l’Amazonie

 

En Amazonie, l’envolée spectaculaire des prix du cacao est en train de provoquer une révolution économique et écologique. Un mouvement croissant d’agriculteurs, traditionnellement tournés vers l’élevage bovin, commence à réduire leurs troupeaux pour se consacrer à la culture de la matière première du chocolat. Cette nouvelle “économie de la forêt debout” ne se présente pas seulement comme une alternative de revenu viable, mais aussi comme un puissant vecteur de restauration pour les zones dévastées par la déforestation.

Avec Le Comptoir de Toamasina nous avons fait un article sur l’açai et la reforestation en Amazonie. Le Comptoir de Toamasina est la première entreprise qui achète de l’açai en poudre qui provient d’un projet de reforestation.

 

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Le déclin d’un modèle : Du pâture à la forêt

 

La région de Marabá, située sur la frontière Est de la déforestation amazonienne au Pará, illustre parfaitement ce contexte. Le long de la route Transamazonienne, héritage des projets pharaoniques de la dictature militaire, le paysage est dominé par d’immenses étendues de pâturages destinés à l’élevage.

C’est dans ce décor que le cacao émerge comme une solution. Contrairement aux grandes monocultures mondiales, notamment en Afrique, qui pratiquent la culture “à plein soleil” et favorisent la déforestation, le modèle brésilien privilégie l’agroforesterie :

  • Intégration écologique : Le cacaoyer est cultivé sous la canopée d’arbres natifs (comme le cumaru ou l’andiroba).
  • Résilience accrue : Avec un bon encadrement, cette méthode rend la plante plus résistante aux maladies, augmente sa longévité et produit des fèves de meilleure qualité, mieux valorisées sur le marché.
  • Restauration : Au Brésil, cette culture est principalement implantée sur des terres déjà dégradées ou en association avec d’autres espèces.
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Le visage humain de la transition

 

Cette transformation est incarnée par des agriculteurs qui passe de l’élevage bovin au cacao.

Mais depuis 2016, les pâturages de sa propriété de 27 hectares régressent au profit d’un système agroforestier (SAF) diversifié, dont le cacao est la star.  Pour les petits éleveurs avec moins de 100 têtes de vaches vont changer pour la culture du cacao.

Aujourd’hui, face au succès de cette nouvelle culture. Aujourd’hui, on voit des agriculteurs qui vont regretter d’avoir défriché la forêt amazonienne.

Au Pará, devenu le premier producteur national devant Bahia, plus de 80 % de la production de cacao provient de l’agriculture familiale, et 70 % est issue de systèmes agroforestiers, selon une étude de l’Embrapa.

 

Briser les mentalités : Les défis du changement

 

Cette transition est une course de fond qui se heurte à des obstacles considérables. Des organisations comme Imaflora, l’Embrapa et le Ministère Public s’investissent pour convaincre les agriculteurs d’adopter ces pratiques durables, en tirant les leçons de l’histoire, notamment de l’ère où la monoculture du cacao à Bahia a appauvri la Forêt Atlantique.

Les principaux freins sont :

  1. Le paradigme historique : Selon Gilmar Lima Costa, du Ministère Public du Pará, la région est marquée par “l’idée qu’il faut tout défricher pour installer un nouveau système”. L’élevage extensif, souvent mal géré (sans fertilisation ni rotation), pousse les agriculteurs à déboiser de nouvelles zones plutôt qu’à optimiser les terres dégradées.
  2. La survie au quotidien : Pour beaucoup de petits producteurs, souvent des migrants préoccupés par leur revenu immédiat, la priorité est de “garantir le pain du lendemain”, comme le souligne Pedro Souza dos Santos de l’ONG Solidariedad, qui travaille dans des zones d’assentiment agraire historiquement marquées par la déforestation.
  3. L’investissement initial : Le cacao demande de la patience. La première récolte n’arrive qu’après quatre ans, et l’obtention d’un produit de qualité, vendu au meilleur prix, exige un travail technique (taille, fermentation) qui décourage ceux qui cherchent un revenu rapide.

 

Une “rédemption” écologique et financière

 

Malgré ces défis, le potentiel du cacao change la donne. Pour Jackson da Silva Costa, la culture est devenue une voie de rédemption. Sa production de bétail a été mise sous embargo pour déforestation illégale. Pour régulariser sa situation, il doit restaurer la forêt qu’il a abattue. Sa solution : planter du cacao en agroforesterie sur les 5 hectares concernés, en association avec d’autres fruits comme l’açaí. “La facture arrive et on ne peut y échapper,” admet-il. “Je vais devoir payer ce que je dois.”

Il est motivé par la rentabilité. Si la patience est requise, le retour financier est puissant : le kilo de fèves se vend autour de 60 R$ (environ 10 €), mais peut atteindre 90 R$ (15 €) selon la qualité.

 

L’avenir : De la fève à la tablette

 

L’objectif du Brésil est de doubler sa production pour atteindre 400 000 tonnes par an d’ici 2030. Mais selon João Ávila d’Imaflora, cette croissance doit se faire sur de nouvelles bases : technologies, variétés plus productives et, surtout, traçabilité.

La véritable révolution réside dans la transformation locale. Des entreprises comme Abelha Cacau, à Altamira, ne se contentent pas de faire du chocolat ; elles explorent 30 dérivés (miel, jus, bière, beurre). L’exemple est frappant :

“D’un kilo de cacao sec, on extrait près de la moitié de beurre, qui se vend 200 R$. Ce seul dérivé génère déjà plus de 100 % de profit. Si je prends le reste pour faire de la poudre, c’est 200 R$ de plus. Je vends 60 R$ ce dont je pourrais tirer 400 R$.”

En transformant le produit en tablettes, la valeur est démultipliée. Ainsi, le cacao ne fait pas que repousser les pâturages ; il offre un modèle économique bien plus lucratif, capable de fixer les familles à la terre tout en restaurant la forêt.