Faire remarcher des paraplégiques : Gert-Jan Oskam est le premier !

Une innovation grenobloise permet à un premier patient paraplégique de contrôler sa marche par la pensée !

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Gert-Jan Oskam paraplégique

Gert-Jan Oskam – CREDIT : Capture youtube

Gert-Jan, un patient hollandais ayant perdu l’usage de ses jambes il y a 12 ans, est actuellement en phase de test d’un dispositif révolutionnaire issu d’une collaboration entre des chercheurs français et suisses. Cette prouesse scientifique sans précédent a été publiée ce jeudi dans la prestigieuse revue Nature.

Le mouvement est encore lent, la démarche incertaine, mais ce que Gert-Jan est en train de réaliser avec un déambulateur était impensable il y a peu. “Il y a 12 ans, j’ai subi une lésion de la moelle osseuse, et depuis 10 ans, j’ai cherché à retrouver l’usage de mes jambes”, raconte le patient hollandais âgé de 40 ans lors d’une conférence de presse tenue à Lausanne. “Ce fut un long chemin pour en arriver là. La marche reste difficile, mais je suis extrêmement heureux d’avoir accompli ce que vous voyez aujourd’hui.” Gert-Jan, victime d’un accident, a perdu la mobilité de ses jambes à la suite d’une lésion de la moelle osseuse qui a interrompu la communication entre son cerveau et les muscles nécessaires à la marche. L’innovation présentée cette semaine et publiée dans la revue scientifique de renom, Nature, vise à établir un “pont numérique” afin de rétablir cette communication entre le cerveau et les jambes. Bien que cette découverte en soit encore à l’essai clinique et nécessite un long chemin avant d’être appliquée à grande échelle, les chercheurs ont prouvé la validité du concept.

Un système non invasif Gert-Jan est le tout premier patient à tester ce dispositif, fruit d’une collaboration entre des équipes françaises et suisses. Les chercheurs ont tout d’abord implanté des électrodes sans fil dans son crâne afin de capter les signaux émis par son cerveau. Ces signaux sont ensuite transmis à un petit ordinateur externe qui, grâce à un algorithme développé par le laboratoire Clinatec du CEA de Grenoble, les décode et les analyse. L’un des défis consiste à réduire au maximum le temps de latence, c’est-à-dire la vitesse de transmission de l’information, afin de rendre les mouvements plus fluides. Guillaume Charvet, responsable du programme pour le CEA, souligne : “Il s’écoule environ 300 à 500 millisecondes entre l’intention de mouvement, lorsque Gert-Jan pense, par exemple, à lever sa jambe, et le moment où nous pouvons prédire ce mouvement à partir des signaux électriques.” En 2019, l’équipe grenobloise avait déjà permis à un patient tétraplégique de se déplacer en commandant un exosquelette.

Des résultats prometteurs dès les premiers essais sur Gert-Jan Oskam. Cette fois, une étape supplémentaire est franchie avec un patient paraplégique : Gert-Jan peut désormais commander ses “vraies” jambes, et non plus seulement un exosquelette. C’est ici que les équipes suisses de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV) entrent en jeu. Des électrodes sont implantées le long de sa moelle épinière. “Cet implant de stimulation envoie des impulsions électriques à la moelle épinière”, explique Henri Lorach, responsable du programme côté suisse. Ce sont ces impulsions électriques qui déclenchent mécaniquement le mouvement. “Il lui suffit de penser à marcher pour faire un pas, s’arrêter, reprendre la marche ou augmenter la hauteur de son pas”, détaille Grégoire Courtine, professeur de neurosciences à Lausanne. “Il peut également bouger ses bras, parler tout en contrôlant la stimulation grâce à ses pensées, c’est-à-dire qu’il projette ses pensées sur les régions de sa moelle épinière qu’il souhaite activer pour marcher.” Ainsi, Gert-Jan, le premier patient à bénéficier de cette innovation, peut désormais contrôler l’amplitude de ses mouvements et se déplacer avec un déambulateur, des béquilles, voire monter des escaliers. Cette avancée médicale représente une véritable prouesse et marque une grande avancée dans la recherche médicale.

L’essai clinique devrait être étendu à d’autres patients. L’objectif de l’équipe franco-suisse est désormais de miniaturiser le système et de l’adapter aux membres supérieurs pour les patients tétraplégiques.