Publicité trompeuse Lidl condamné à verser la somme record de 43 millions d’euros à Intermarché
Par un arrêt retentissant du 4 juillet 2025, la Cour d’appel de Paris a sanctionné lourdement l’enseigne allemande pour ses pratiques commerciales déloyales. Au cœur du litige : des promotions télévisées alléchantes mais indisponibles en magasin. Une décision qui redéfinit les règles de la guerre des prix.

Le détail surprenant du logo Lidl qui captive les réseaux sociaux
C’est un séisme dont l’onde de choc va faire trembler les rayons de la grande distribution française. Ce 4 juillet, la Cour d’appel de Paris a sifflé la fin de la récréation publicitaire pour Lidl, en condamnant l’enseigne de “smart discount” à verser 43 364 409 euros à son concurrent ITM Alimentaire International (Intermarché).
Bien loin des amendes symboliques habituelles, cette sanction record marque un tournant. Elle vient punir une stratégie bien rodée : inonder les écrans de télévision de spots pour des robots-cuiseurs ou de l’outillage à prix cassés, sans avoir les stocks suffisants derrière pour satisfaire la demande.
La fin du “Vite, il n’y en aura pas pour tout le monde”
L’affaire remonte à la période 2017-2023. Durant ces années, Lidl a opéré une mutation spectaculaire, passant du hard-discount austère à une image plus qualitative, portée par une présence massive à la télévision (374 spots incriminés).
Le problème ? La loi française (décret de 1992) impose qu’une publicité télévisée s’appuie sur une offre disponible dans tous les magasins participants pendant 15 semaines. Or, l’enquête a révélé que Lidl contournait cette règle : les produits n’étaient disponibles que quelques jours dans la majorité du réseau, créant un sentiment d’urgence artificiel chez le consommateur.
Pour sa défense, l’enseigne allemande argüait que des bandeaux défilants (disclaimers) renvoyaient vers son site internet pour connaître les stocks réels. Un argument balayé par les juges, s’appuyant sur des sondages accablants : un téléspectateur sur deux ne voyait même pas ces mentions. Pour la Cour, la tromperie est caractérisée.
La “Campagne Miroir” : une révolution juridique
Au-delà du montant, c’est la méthode de calcul de l’amende qui fera date. Habituellement, prouver qu’une publicité déloyale a fait perdre des clients à un concurrent est un casse-tête juridique.
Cette fois, la Cour a validé une approche novatrice proposée par Intermarché : la méthode de la « campagne miroir ». Le raisonnement est implacable : puisque Lidl a capté l’attention des consommateurs de manière illégale, le préjudice correspond au budget qu’Intermarché aurait dû dépenser en publicité pour contrer cette offensive et récupérer cette part de voix.
En monétisant ainsi l’attention volée au consommateur, les juges transforment le droit de la concurrence en une arme de dissuasion financière massive.
Carrefour en embuscade
Les conséquences sont immédiates pour Lidl. Outre l’amende, l’enseigne doit publier sa condamnation sur sa page d’accueil et ses réseaux sociaux pendant deux mois, un véritable “pilori numérique”. De plus, une épée de Damoclès plane : une interdiction de diffusion sous peine de 10 000 euros d’astreinte par jour si les stocks ne sont pas garantis.
Mais le pire est peut-être à venir. Ce jugement crée un précédent redoutable pour d’autres contentieux en cours, notamment face au groupe Carrefour, qui reproche les mêmes pratiques à son rival allemand. Avec la jurisprudence de la “campagne miroir”, la facture totale pour Lidl pourrait dépasser les 100 millions d’euros. La guerre des prix continue, mais elle se jouera désormais aussi, et surtout, dans les prétoires.

