Super-tempête solaire : que se passerait-il si le Soleil paralysait notre technologie ? L’ESA teste sa réponse d’urgence
Dans une simulation sans précédent, l’Agence Spatiale Européenne (ESA) a testé sa capacité à réagir à une éruption solaire majeure, semblable à l’événement de Carrington de 1859 qui pourrait, aujourd’hui, déconnecter le monde en quelques minutes.
En résumé :
- L’agence a simulé un scénario extrême où les télécommunications de la planète seraient compromises.
- Le test a recréé les conditions d’une éruption solaire géante, comme celle de 1859, qui avait provoqué des incendies sur les lignes télégraphiques et des aurores boréales jusqu’aux tropiques.
- Durant l’exercice, le satellite Sentinel-1D a perdu son signal et a présenté des défaillances, simulant les effets réels d’une super-tempête.
- Les experts alertent que le Soleil atteint actuellement le pic de son cycle, rendant de tels événements plus probables.
- Pour éviter un effondrement technologique, l’ESA et la NASA multiplient les entraînements et élaborent des plans de réponse aux futures explosions solaires.
Éruption solaire extrême enregistrée en 2003 par l’observatoire SOHO : l’explosion, 28 fois plus puissante qu’une éruption typique de classe X, a propulsé des milliards de tonnes de plasma à plus de 8 millions de km/h dans l’espace. — Photo : ESA/NASA
Une simulation du chaos : l’événement de Carrington comme scénario catastrophe
Imaginez un black-out planétaire, dans l’espace comme sur Terre : satellites hors de contrôle, GPS inopérants, appareils électroniques en panne et réseaux électriques s’effondrant. C’est ce scénario extrême qu’ont simulé les ingénieurs de l’Agence Spatiale Européenne (ESA) en Allemagne, lors d’un exercice inédit visant à tester la capacité humaine à réagir à une tempête solaire de grande ampleur.
L’expérience, menée au Centre Européen d’Opérations Spatiales (ESOC) à Darmstadt, a réuni des dizaines d’ingénieurs et d’experts en météo spatiale pour affronter, de manière simulée, le pire cauchemar de notre infrastructure technologique moderne : une super-tempête solaire comme celle qui a frappé la Terre en 1859, connue sous le nom d’événement de Carrington, la plus intense jamais enregistrée.
À l’époque, la planète vivait encore à l’ère du télégraphe. Malgré cela, la tempête avait suffi à provoquer des incendies sur les lignes de transmission et à illuminer le ciel nocturne de couleurs rougeâtres jusqu’aux régions tropicales, avec des aurores observées jusqu’à Cuba. Aujourd’hui, dans un monde totalement dépendant des satellites, d’Internet et des systèmes électriques, un événement similaire aurait des impacts catastrophiques. C’est précisément ce type de scénario que l’ESA cherche à éviter.
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L’épreuve du Sentinel-1D : une panne simulée en temps réel
Cet exercice s’inscrivait dans le cadre de la préparation au lancement de Sentinel-1D, le nouveau satellite européen d’observation de la Terre, dont le décollage est prévu pour le 4 novembre.
Le test a commencé normalement, simulant le lancement et les premières opérations du satellite avec des systèmes fonctionnels et des communications stables. Cependant, quelques minutes plus tard, les données ont commencé à présenter des anomalies et le signal du satellite est devenu instable, comme s’il venait d’être frappé par une violente éruption solaire.
☀️ Qu’est-ce qu’une éruption solaire ? Il s’agit d’une explosion d’énergie à la surface du Soleil, causée par la rupture de champs magnétiques. En quelques minutes, elle chauffe le plasma à des millions de degrés et libère des radiations qui peuvent perturber les satellites, le GPS et les communications sur Terre.
L’objectif était de confronter l’équipe à un scénario où une éruption simulée, d’une intensité comparable aux plus grandes jamais enregistrées, frapperait virtuellement le satellite, provoquant des pannes en cascade dans les systèmes de communication, les radars et la navigation – exactement comme lors d’une tempête solaire réelle.
Le scénario s’est alors complexifié. Les systèmes ont commencé à répondre de manière erratique, simulant les effets d’une tempête de classe X45, la plus puissante sur l’échelle de mesure de ces explosions. Dans la réalité, une éruption d’une telle magnitude pourrait provoquer des pannes généralisées des communications et des réseaux électriques.
Comprendre le phénomène : éruption et éjection de masse coronale
Selon les scientifiques, les radiations d’un tel événement atteindraient la Terre en environ huit minutes, ne laissant pratiquement aucun temps de réaction. La simulation a donc reproduit les effets d’une éjection de masse coronale (EMC), un gigantesque nuage de particules chargées projeté par le Soleil.
Lorsqu’un de ces nuages frappe le champ magnétique terrestre, il peut provoquer des tempêtes géomagnétiques : des distorsions capables de perturber le fonctionnement des satellites, d’endommager les réseaux électriques et même de générer des aurores visibles à des latitudes inhabituelles, comme au XIXe siècle.
« En cas de tempête de ce type, la traînée atmosphérique subie par les satellites peut augmenter de 400 %. Cela élève le risque de collisions et réduit la durée de vie des missions en raison d’une plus grande consommation de carburant », a affirmé Jorge Amaya, coordinateur de la modélisation de la météo spatiale à l’ESA.
Au cours de l’exercice, les équipes ont également dû gérer des pannes des instruments d’orientation, des pertes de signal et des erreurs de capteurs. L’idée était de tester leur réaction à des défaillances simultanées, un cas de figure très probable lors d’une véritable tempête solaire. « Si un tel problème se produit réellement, il n’y a pas de solution miracle. L’objectif serait de sécuriser le satellite et de limiter les dégâts autant que possible », a expliqué Thomas Ormston, directeur adjoint des opérations de Sentinel-1D.
Un risque solaire de plus en plus surveillé
Cette simulation de l’ESA s’inscrit dans une série d’exercices internationaux menés pour préparer les gouvernements et les agences spatiales à l’augmentation de l’activité solaire. Le Soleil suit des cycles d’environ 11 ans, et le cycle actuel, le Cycle 25, est à son apogée.
Selon la NASA, le nombre d’éruptions enregistrées ces derniers mois a été supérieur aux prévisions. Entre 2024 et 2025, plus de dix tempêtes solaires classées comme fortes ont atteint la Terre, le nombre le plus élevé depuis 2003. Elles ont provoqué des aurores dans des lieux peu communs comme la France, l’Allemagne et le nord des États-Unis, et ont causé des pannes temporaires de signaux GPS et de communications radio.
Pour réduire les risques, les pays renforcent la surveillance et l’échange d’informations. L’ESA maintient le programme “Space Weather Readiness”, tandis que la NASA développe le plan “Solar Storm 2030” pour protéger les satellites et les réseaux électriques.
Se préparer pour ne pas être pris par surprise
Des agences spatiales des États-Unis, d’Europe, du Japon et du Canada réalisent des entraînements conjoints en utilisant les données en temps réel de satellites comme Solar Orbiter et SOHO. Ces tests aident à définir des protocoles d’alerte et à améliorer la communication entre les centres de prévision.
L’objectif, selon les experts, est simple : ne pas être pris au dépourvu. Les tempêtes solaires font partie du comportement naturel du Soleil. Bien que la plupart ne causent que des interférences mineures, les organismes de surveillance veulent s’assurer que le monde sera prêt si une éruption majeure venait à se reproduire.
« La principale conclusion est que la question n’est pas de savoir ‘si’ cela se produira, mais ‘quand’ », a souligné Gustavo Baldo Carvalho, responsable de la simulation pour Sentinel-1D. « L’ampleur et la diversité des impacts nous ont poussés à nos limites, mais l’équipe a su maîtriser le défi. »